BÉRÉCHITE (Genèse)
CHÉMOT (Éxode)
VAYIKRA (Lévitique)
BAMIDBAR (Nombres)
DÉVARIM (Deutéronome)

 

 

L’alliance : la circoncision et le Chabbat 

‘’Au huitième jour, on circoncira l’excroissance de l’enfant’’(Lév. XII –3) 

Le Talmud (Chabbat 132 a) retient de ce verset l’indication relative à la pratique de la circoncision, même le Chabbat huitième jour de la naissance de l’enfant. L’introduction dans l’alliance a la primauté sur les interdits du Chabbat comme le précise la Thora ‘’ouvayom’’, ‘’et le jour’’, obligation impérative du huitième jour. Et pourtant tout ouvrage est interdit en ce jour et l’infraction à la loi  relève de la plus haute gravité ; le caractère de ce jour réclame de toute personne de  se consacrer à ce saint jour, et d’y inclure également ses jeunes enfants, ses serviteurs, ses animaux et l’étranger qui est dans ses murs. D’aucuns étendent cela aussi à tout objet personnel pour le soumettre au respect du Chabbat. L’importance accordée à ce jour apparaît par ailleurs à travers la sanction qui frappe la personne qui lui fait outrage. La centralité du Chabbat et son impact considérable repose sur le principe de la création ex nihilo, qu’il met en exergue. En effet, s’abstenir de tout ouvrage, de toute manifestation de suprématie sur les éléments, c’est attester de la foi que D… est le créateur de l’univers en six étapes et qu’Il en est le législateur ; le respect du chabbath fait écho à notre croyance  en l’unité absolue de D.. et sa suprématie sur toutes les choses créées.   Enfreindre le Chabbat, c’est renoncer à ce qui est le fondement de l’édifice du judaïsme, de ce qui constitue sa colonne vertébrale, de ce qui lie l’homme à son créateur.

 Et néanmoins la prescription de la circoncision a la primauté sur le Chabbat. Certes celle-ci est également fondamentale. Elle évoque l’alliance conclue dans la chair entre D… et le peuple d’Israël et atteste du lien indéfectible du Patriarche Avraham et à travers lui, les générations à venir, avec le créateur. Comme il est dit : ‘’J’érigerai mon alliance entre Moi et entre toi et ta postérité pour leurs générations, en alliance éternelle, afin d’être pour toi D… comme pour ta descendance après toi’’ (Gen. XVII – 7).

La nature de cette alliance porte sur les générations à venir, également pour   l’héritage de la terre d’Israël. Comme dit le texte : ‘’Et Je donnerai à toi et à ta postérité la terre de ta résidence, toute la terre de Canaan en possession éternelle et Je serai leur D…, et toi sois fidèle à mon alliance, toi et ta postérité après toi à travers leurs générations’’(Gen. XVII – 8, 9).Le texte de la Thora laisse apparaître clairement le lien entre l’alliance de la circoncision et le don de la terre d’Israël, comme nous le proclamons par ailleurs, dans la liturgie du Chabbat : ‘’Tu ne l’as pas donnée ô Eternel notre D… aux nations de la terre, Tu ne l’as pas léguée ô notre Roi aux idolâtres, dans son repos ne peuvent s’installer les incirconcis…’’. Ainsi donc, par le biais de la suppression de l’excroissance du prépuce, le peuple d’Israël accède à la sainteté du Chabbat, et celui-ci le conduit à la terre d’Israël et lui procure les droits sur elle. Comme dit le prophète Isaïe: ‘’Si tu évites à tes pieds de violer le Chabbat en faisant tes affaires en mon jour sacré, si tu nommes le Chabbat ‘’délices’’, honoré pour la sainteté de l’Eternel, si tu l’honores en ne vaquant pas à tes affaires…. Tu te délecteras de l’Eternel ; Il te hissera au sommet du monde, Il te nourrira de l’héritage de Jacob ton père’’ (58 – 13, 14). Et ainsi que l’illustre le Talmud (Menakhoth 53 b) à travers ce récit de nos Sages : Lorsque le Temple fut détruit, le Saint béni soit-Il vit le patriarche Avraham au milieu des ruines. 

-D… lui dit : Que fait mon bien-aimé dans ma maison ?

-Avraham répondit : Je suis là pour mes enfants.

-Tes enfants ont enfreint la loi et ils ont été exilés.

-Avraham dit à l’Eternel souviens- toi de l’alliance de la circoncision.

-Ils ont manqué à cela dit l’Eternel.

 Ainsi donc la fidélité à la circoncision est garante du don du chabbat et celui –ci  de la terre d’Israël. Rappelons à cet effet que notre tradition compte trois ordonnances de la Thora qui ont la prépondérance sur le Chabbat : 

1) l’offrande des sacrifices au Temple au temps prescrit (Psahim 77b)

2) la circoncision au huitième jour  (Chabbat 132 a)

3) et le danger de mort lèvent    tous    les interdits  du chabbath.

Ces trois éléments correspondent aux trois péchés capitaux pour lesquels il est du devoir de l’homme de se livrer à la mort plutôt que de les enfreindre, à savoir l’idolâtrie, la violence sexuelle et l’homicide. L’offrande des sacrifices journaliers a pour objet de nous éloigner de l’idolâtrie ; l’alliance de la circoncision contribue à nous sauvegarder de toutes dépravations sexuelles ; le danger de mort nous éveille à porter notre attention  à la vie du prochain. Ainsi, de même que nous devons donner la primauté à la sauvegarde de notre âme, en cédant notre corps à la mort plutôt que de commettre le péché de l’idolâtrie, de l’inceste et de l’homicide, de même le Chabbat. chargé d’une âme supplémentaire,  nous concède de préserver l’âme qui nous anime à travers l’alliance de la circoncision, l’offrande du sacrifice et la mort qui nous menace ; de la sorte, nous accédons à la proximité divine.

 

L’offrande de purification 

‘’Le prêtre ordonnera qu’on égorge l’un des oiseaux au-dessus d’un vase d’argile sur de l’eau vive’’(Lév. XIV – 5).

L’indication de ce verset fait partie du procédé de purification d’une personne atteinte d’une affection de ‘’tsaraâth’’ communément identifiée à la lèpre. Cette maladie cutanée est provoquée, selon nos Sages, par la médisance. Ce qui rejoint l’enseignement du Midrach Rabba qui rapporte que Rabbi Yéhochoua ben Lévy relève dans le texte de la Thora la formule ‘’Zoth Thorath ha Metsaroâ’’ répétée à cinq reprises au cours des chapitres relatifs aux plaies lépreuses. Il en conclut que c’est l’étude de la Thora et la réalisation des mitzvoth qui apporteront le meilleur remède  contre les défauts moraux à l’origine des maladies rapportées dans le texte.  D’aucuns remarquent que ‘’Maïm hayim’’ qui figure dans ce procédé de purification, apparaît également en rapport avec la procédure de purification d’une impureté contractée par le contact d’un cadavre. Ce même élément participe également au traitement appliqué à la femme soupçonnée d’adultère. Ainsi donc à trois reprises, l’eau vive, ce même élément, intervient.  A la réflexion, nous constatons que dans ces trois situations, la personne affectée est montrée du doigt et se trouve quelque peu exclue de la communauté. Dans le cas de la personne atteinte de cette affection cutanée, l’isolement et la réclusion hors du campement lui permettent de faire une introspection et de cesser de semer la mauvaise parole et le mal qu’elle provoque en pratiquant la médisance. Dans le même ordre d’idée, l’impureté au contact d’un mort contraste avec la pratique des mitzvoth, de la Thora, de la vie.  Enfin, la femme ‘’sota’’ souffre soit de la médisance ou de l’impureté provoquée par son infidélité. Dans l’un ou l’autre des trois cas évoqués, il est nécessaire de retrouver le sens  vrai d’une eau de vie, de l’élément symbolique qui véhicule la vie et l’alimente. Pour cela, il faut juguler l’égoïsme et l’égocentrisme représentés dans la Thora en la circonstance par cet oiseau vivant apporté en sacrifice ; ce symbole de liberté qui verse dans l’anarchie et qui rejette toute forme d’autorité qui freinerait ses appétits insatiables de jouir égoïstement de la vie. C’est à cette conception de vie limitée à soi, que l’homme doit renoncer pour se porter vers son prochain. Cet altruisme est véhiculé par les enseignements de la Thora et la pratique des mitzvoth. C’est cette leçon de la vie que projette cette image décrite dans le texte d’un oiseau égorgé au-dessus d’un vase d’argile contenant de l’eau vive. C’est ce message de vie fondée sur la Thora qui est réservé tant à la personne atteinte de ‘’tsaraâte’’, à la femme ‘’sota’’ qui désire échapper aux méfaits de la médisance et de la jouissance égoïste recherchée. C’est là également, la recommandation à la personne rendue impure au contact d’un corps inanimé représentant l’animalité contenue en nous. La liberté et le bonheur de la vie ont pour cadre le mode de vie prescrit par la Thora.

 

La poésie de Bilaam 

Bilaam, prophète des nations, fait une description du camp des Israélites, d’une telle beauté qu’elle est devenue partie intégrante de la liturgie juive, et que les Sages l’ont choisie pour être récitée à l’entrée de  la Synagogue.’’Qu’elles sont belles tes tentes, ô Jacob, tes demeures, ô Israël ! Elles se développent comme des vallées, comme des vergers le long d’un fleuve. D… les a plantées comme des aloès, comme des cèdres au bord des eaux. La sève ruisselle de ses branches et sa graine est abondamment arrosée. Son roi est grand, sa royauté est souveraine’’. Cette superbe envolée poétique de Bilaam fait partie également de la prière supplémentaire de Roch Hachana.. On peut s’étonner du choix porté par nos Sages sur ces paroles, parmi tant d’autres aussi merveilleuses et aussi sublimes à travers la Bible. Pourquoi donc la primauté fut-elle accordée à ce prophète des nations, symbole de la haine du peuple d’Israël, et ce, même un jour solennel de Roch Hachana ? Peut-être est-ce précisément la haine viscérale qui animait Bilaam à l’égard d’Israël qui a plaidé en faveur de ce choix, parce qu’il révèle aux yeux de tous, la reconnaissance des valeurs profondes du peuple juif que ses ennemis étouffent dans un sentiment de rancœur et de refus identitaire. Cette idée ressort dans le Talmud (Sanh. 105 b) qui enseigne : ‘’l’amour nuit au jugement équitable, comme la haine’’. Certes, il est de la nature humaine de porter un jugement bienveillant en faveur de ses proches,  comme il est naturel chez les parents lorsqu’ils parlent de leurs enfants (Chab 10 b).

 A l’opposé, une haine avérée chez la personne, la porte à proférer des paroles avilissantes, à l’exemple de la diatribe d’Haman à l’encontre du peuple juif. Ainsi donc, des paroles glanées à travers la Bible qui glorifieraient les enfants d’Israël et leurs lieux de culte, pourraient être mal perçues et considérées comme une autosatisfaction exagérée.  Mais lorsque c’est un ennemi juré qui prononce des paroles sublimes, porté par un débordement d’admiration et une reconnaissance du peuple d’Israël et de ses maisons de prières, alors ses mots valent leur pesant d’or. Cette réflexion est illustrée dans le Talmud (Chab 119 b) qui enseigne : chaque vendredi soir, deux anges accompagnent l’israélite de retour de la Synagogue à son foyer. Un ange malfaisant,  et un ange de bonté. Les deux assistent à l’accueil du Chabbat au sein de la famille. Témoins de l’ambiance Chabbatique qui règne dans le foyer, accueillis dans  une maison bien éclairée, rehaussée par l’éclat des lumières du Chabbat, et une table bien dressée avec deux belles halloth et du vin, constatant l’atmosphère de bonheur et d’harmonie, de joie et de chaleur humaine qui trône en l’honneur du Chabbat, l’ange du bien exprime le souhait ‘’qu’il en soit ainsi le Chabbat suivant’’ et le mauvais ange est contraint de dire ‘’amen’’. 

 

 

 

Grand Rabbin Chalom Benizri.