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BÉRÉCHITE (Genèse)
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L’oubli ‘’C’est pourquoi les fils d’Israël ne mangent point aujourd’hui encore, le nerf sciatique qui tient à la cavité de la cuisse, parce que Jacob fut touché à la cavité de la cuisse sur le nerf sciatique’’ (Gen. 32 – 33). Cette interdiction de la Thora clôture le récit de la lutte de Jacob avec l’ange, être divin, qui était selon la tradition, le génie d’Esaü. Celui-ci avait l’intention de terrasser et de vaincre Yaakov. Mais il ne réussit qu’à le faire souffrir en lui déboîtant la hanche. C’est ce qui ressort de l’explication du verbe ‘’nacho’’ avancée par Rachi, inspiré du Talmud : le nerf de la hanche a été démis de sa place. Cependant le verbe ‘’nacho’’ revêt d’autres significations, parmi lesquelles celle invoquée par Yossef Ha Tsadiq, qui donne à son fils premier né le nom de Ménachée, en s’exclamant : ‘’ Car D… m’a fait oublier toutes mes peines et toute la maison de mon père’’ (Gen. 41 – 51). Yossef rend grâce à l’Eternel d’avoir extirpé et chassé de son esprit les souffrances qu’il a connues dans la maison paternelle. L’oubli s’apparente donc au souvenir arraché à la mémoire vive de la personne, à la connaissance qui demeure dans son esprit et qui en est chassée. On peut dès lors se demander comment traduire l’expression ‘’guid hanaché’’. Comment et pourquoi appellerions-nous la luxation de ce nerf atrophié, le nerf de l’oubli ? L’oubli, comme tant d’autres facultés innées chez l’homme, présente deux facettes diamétralement opposées. D’une part, l’oubli est un don en l’absence duquel la vie nous serait insupportable. Si le Saint béni soit-il, n’avait pas décrété que la mort d’un proche soit couverte par l’oubli, l’homme vivrait toujours avec le souvenir amer du jour où ce proche parent l’a quitté, car, sa vie durant, il éprouverait la douleur de cette séparation. Aussi, D… a fait en sorte que cette amertume s’estompe progressivement, après une période de trois jours, puis sept, puis de trente, puis d’une année. Ainsi donc, l’oubli aide l’homme à surmonter la douleur de la séparation et à poursuivre le chemin de sa vie. En l’absence de l’oubli, l’homme ne peut réprouver le sentiment de vengeance qui l’anime, ni taire la joie du mal qui frapperait son ennemi. Seule cette faculté déposée en lui, permet d’atténuer les sentiments qui l’envahissent et le submergent au moment du choc de la confrontation. D’un autre côté, l’oubli peut constituer un danger néfaste pour l’homme. Comme dit la Thora :’’Tu dédaignes le Rocher qui t’a engendré et tu dédaignes le D… qui t’a fait naître’’. (Deut. 32 – 18)Il est donc impératif de distinguer ce qu’il convient de laisser tomber dans l’oubli, de ce qu’il faut préserver. Chasser les enseignements de la Thora de son cœur et les couvrir d’oubli, est lourd de gravité. La conséquence est telle que les Sages disent dans les ‘’Maximes des Pères’’(chap. 3 – 8) ’’Quiconque oublie une parole de son étude, la Thora le considère comme s’il s’était rendu coupable vis à vis de son âme. Comme il est dit : ’’Seulement garde-toi et garde très bien ton âme, de crainte que tu n’oublies les choses que tes yeux ont vues’’. (Deut. 4 – 9) On pourrait croire que cette mise en garde s’applique même si son étude était trop forte pour la personne. C’est pourquoi le verset continue ‘’Et de crainte qu’elle ne se retire de ton cœur tous les jours de ta vie’’. L’homme n’est donc pas coupable tant qu’il ne s’est pas assis pour les retirer de son cœur. A la lumière de cela, nous pouvons comprendre que la douleur infligée à Yaakov par l’ange tutélaire d’Esaü, se traduit par l’atteinte à l’oubli. En d’autres mots, l’ange avait inoculé le germe de l’oubli en Yaakov le patriarche. Cette imperfection porte atteinte à l’intégrité des descendants du patriarche Yaakov. Et bien que ce dernier soit sorti vainqueur de cette lutte, il fut néanmoins marqué sur le moment. L’interdiction de ‘’guid hanaché’’, du ‘’nerf de l’oubli’’, doit nous rappeler que le peuple d’Israël, bien qu’il soit ‘’par suite de son élection’’ destiné à subir de nombreuses persécutions dans les pays où il sera exilé, survivra à tous ses ennemis, jusqu’à l’arrivée du libérateur. En observant cette mitzva, nous nous souviendrons de la lutte de notre ancêtre Yaakov et nous garderons intacte notre confiance en l’Eternel. Notre foi, immunisée contre le nerf de l’oubli, nous permet de voir la fin de l’exil, et le lever du soleil de la libération nous guérira de tous nos maux. Et de même que ‘’le soleil se leva’’ pour notre patriarche Yaakov, notre peuple verra poindre les lumières de Hanouka et celles de l’avènement messianique. Rappelons à ce propos que c’est cet élément qui se trouve souligné dans le texte liturgique réservé à la fête de Hanouka : ‘’Lorsque se dressa le royaume grec impie contre ton peuple Israël pour lui faire oublier ta Thora et transgresser les commandements de ta volonté’’. Le but recherché était de leur faire oublier la Thora.
Yossef et ses frères De nombreux commentateurs de la Thora expriment un profond étonnement quant à l'attitude étrange de Yossef à l'égard de son père Yaakov. En effet, durant vingt-deux ans, Yossef vit un exil imposé et des tribulations douloureuses en Egypte, avant de connaître la grandeur et devenir le vice-roi du pharaon d'Egypte; et à aucun moment il ne donne de ses nouvelles à son père bien-aimé, qui continue à porter le deuil de son enfant chéri. Comment expliquer ce silence cruel de Yossef? De nombreux exégètes ont tenté d'expliquer cette énigme. Une des tentatives de réponse des plus séduisante, fut celle de Rabbi Yossef Ibn Kaspi (1280 - 1340). Celui-ci soutient que l'état de misère humaine dans laquelle était plongé Yossef, ballotté et tiraillé d'un maître à l'autre, réduit à la condition d'esclave objet que l'on exploite sans répit, complètement englouti et enseveli sous le poids de la servitude , ne lui permettait pas de se soustraire à cette emprise et donner de ses nouvelles. Et quand bien même cela lui aurait été possible, dit Rabbi Yossef Ibn Kaspi, il n'aurait pas voulu faire part de son état misérable d'esclave à son père, pour lui épargner une souffrance plus profonde. Elevé au rang de vice-roi, Yossef vit comme un éclair la réalisation naissante de ses rêves . Surpris de voir ses rêves prendre corps, il nourrit le secret de sa condition nouvelle afin de ne pas hâter les événements , au risque d'interrompre le processus de matérialisation des rêves qu'il avait fait au sein de sa famille et qui ont été à la source des tribulations qu'il a connues , et de sa grandeur présente. Cette argumentation n'est pas confortée par le texte de la Thora qui nous apprend que Potiphar avait nommé Yossef premier intendant de tous ses biens. Par ailleurs, le récit de la tentative de séduction que la femme de Potiphar exerce sur Yossef, nous laisse supposer qu'il lui était loisible dans cette situation d'aviser son père de ce qu'il lui était advenu. Aussi, la réponse suggérée par Rabbi Yossef Ibn Kaspi ne nous satisfait pas pleinement . L'explication de ce silence volontaire de Yossef, réside dans la motivation profonde qui génère et alimente la tension , voire même la haine entre Yossef et ses frères. En effet, il serait puéril de penser qu’une tunique bariolée offerte par Yaakov Avinou à son fils de la bien aimée Rachel, soit à la base de cette animosité , et que les rêves de Yossef l’auraient attisée davantage, au point que ses frères , et tout particulièrement Shimon et Lévi veuillent attenter à sa vie. Ce qui conduit Rabbi Itzhaq Arama à se demander le pourquoi la Thora ne fait pas mention de la punition encourue par la transgression de nourrir un sentiment de haine aussi ravageur et cruel. Aussi, dit ce grand maître, je suis convaincu que le différent entre Yossef et ses frères ne relève pas d’un sentiment haineux motivé par des intérêts individuels. En vérité, il s'agit là d’un cas d’espèce, de personnalités appelées à porter le titre de patriarche, et donner naissance au peuple d'Israël. Vu sous cet angle, nous pouvons comprendre l'attitude du patriarche Yaakov, de Yossef hatsadik et des futurs chefs des tribus d'Israël. Le patriarche Yaakov ne savait pas que ses enfants devaient porter chacun le titre de chef d’une tribu d’Israël. Il pensait qu'il allait connaître le même destin que celui de ses prédécesseurs Itzhaq et Avraham, voire même celui de l'ancêtre Térah. En effet, des enfants de Terah, adorateurs d’idoles, Avraham porte le titre d’ Hebreu et devient le précurseur du monothéisme. Il est le seul à répandre la connaissance du D… UN, et tout ce qui en découle sur le plan moral et social. Avraham a donné naissance à Ichmaël et à six autres enfants de sa dernière épouse Ketora, et seul Itzhaq restera fidèle à la foi de son père et assurera à son tour avec rigueur la transmission des mêmes valeurs à ses descendants. Et à son tour, Isaac connaît le même sort, de ses deux enfants, Essav et Yaakov,seul ce dernier demeure dans la voie tracée par son père. Yaakov prend la relève pour devenir à son tour un patriarche fidèle aux enseignements de ses illustres pères . Il en serait de même pensait-il pour lui, seul un de ses enfants sera le garant du patrimoine spirituel, éthique et social initié par Avraham et Itzhaq . Et c’est cette conviction qui le conduit à porter tout son attention et son dévolu sur son fils Yossef, premier né de son épouse bien aimée Rachel. Les signes d’amour que Yaakov témoigne à Yossef, ne sont pas à mettre sur le compte de gâteries que l’on voue à un enfant de la vieillesse. La Thora souligne clairement que Yaakov appelé Israël, aimait Yossef plus que tous ses fils. Et ces derniers l’avaient bien perçu. Mais le ressentiment éprouvé , n’est pas l’expression d’une jalousie que l’on pourrait qualifier de naturelle. En vérité, les frères de Yossef avaient décelé dans les signes affectueux de leur père la volonté de forcer le destin à porter Yossef à leur tête , et le designer comme le futur successeur de la lignée de Avraham, Itshaq et Yaakov. C’est contre ce projet néfaste à leurs yeux que les frères deYossef s’élèvent avec détermination. Ils étaient animés de la foi et de la volonté inébranlable de former tous ensemble le futur ’’ Klal Israël ‘’ l’assemblée du peuple d’Israël. Ils voulaient assurer la continuité de la chaîne des générations non plus par la succession de personnages , aussi illustres soient-ils, pour ne former qu’une famille autour d’un patriarche, mais fonder une Nation. Ainsi donc, ce qui animait la pensée et le cœur des frères de Yossef c’est la lutte existentielle de la future nation d’Israël Pour répondre à la question de savoir pourquoi Yossef surnommé le tsadik, l’homme juste, n’a pas avisé son père et sa famille de ce qu’il est advenu de lui et qu’il est toujours en vie… pourquoi ce silence si cruel pour un père qui endure un deuil si lourd, sans trouver de consolation ? Nous avons au préalable tenté d’expliquer ce qui se dissimulait derrière la dissension entre d’une part Yaakov et Yossef (Benjamin mis à part), et les autres frères. Nous avons montré que Yaakov et Yossef à sa suite, pensait que seul ce dernier assurerait la lignée de ses pères. En somme, Yossef deviendrait à son tour un patriarche , à l’instar de Avraham, de Itzhaq et de Yaakov, en attendant le moment favorable où une descendance nombreuse constituera la nation juive. Les frères n’étaient pas de cet avis. Ils croyaient fermement qu’ensemble ils resteraient unis pour former désormais le peuple d’Israël, et rien ni personne ne pourrait entraver ce dessein. C’est pourquoi ils en voulaient à Yossef, au point même de chercher à attenter à sa vie. Mais vendu aux Egyptiens, Yossef a réalisé que ses aspirations étaient illusoires, et qu’il n’était pas destiné à être le porte-drapeau et le successeur unique des patriarches. Et les douloureuses tribulations qui l’ont assailli, l’ont renforcé dans cette idée. Il voyait en ce qu’il advenait de lui, un passage obligatoire, une épreuve nécessaire pour s’élever dans la spiritualité, à l’exemple de son père qui a connu l’exil de la maison familiale durant de nombreuses années. Yossef prit conscience qu’il ne serait pas juste que ses frères soient mis à l’écart du projet du devenir du peuple d’Israël en sa faveur. Le temps était venu pour que tous les frères forment l’assemblée de la communauté d’Israël. Et le fait que son père n’a pas bénéficié d’une vision prophétique pour savoir ce qu’il est advenu de son fils bien-aimé, est le signe que la volonté de la providence divine s’inscrit dans le cours des événements. Et dès lors , il ne convient pas qu’il donne de ses nouvelles à son père et suscite chez lui des doutes et des souffrances quant à la transmission de l’héritage spirituel et social des patriarches.
Berakha véhatslaha Il nous est bien connu que chacun des termes de la Thora , chacune de ses tournures et de ses expressions, voire même de ses lettres , se présentent sous divers aspects et se prêtent à de multiples interprétations ; d’où le dicton répandu ‘’chivi’in panim la Thora – la Thora se présente sous septante facettes. Ces divers modes de perception du message de la Thora qui nous permettent d’y déceler ses secrets, peuvent être classés à quatre niveaux d’approche dans l’étude : le pschat, lecture littérale attachée au sens des mots et à l’expression utilisée ; le rémèz, approche du texte par allusion , par analogie ou par similitude à d’autres passages de la Thora ; le drach, analyse du texte au niveau de l’homélie à travers la parabole, ou encore la métaphore ; le sod, scruter le texte pour découvrir le mystère qu’il recèle. Chacune de ces manières d’aborder le texte, débouche sur divers horizons et nous offrent une variété d’ouvertures dans l’étude. Chacune de ces voies d’accès nous permet de découvrir des perles d’une grande beauté et décile nos yeux, à l’exemple de la préparation, d’un cocktail qui réclame le mélange de divers alcools, de parfums différents, de goûts variés, et d’un dosage habile, pour satisfaire un palais gourmet ; ou encore celui d’un mets élaboré par un maître queux , pour une délectation raffinée. Ainsi en est-il dans la forme de présentation et d’exposé d’un enseignement de la Thora, pour en extraire la grâce et l’harmonie qui l’habite. Aussi, d’aucuns abordent le texte en l’observant tout à la fois sous deux modes d’approche, tels que l’aspect halakhique, présenté à la lumière de la marche à suivre (la halakha – la démarche), et transporté sur le plan homilétique en empruntant la métaphore, à l’instar de l’auteur du commentaire’’ Michné lamelekh’’, dans son ouvrage ‘’parachat derakhim’’ ; ou encore celui de Rabbi Yehouda Epschitz dans son ouvrage ‘’Yaaroth devach’’ ; et aussi l’auteur des ‘’Tourim’’, qui use tout à la fois des textes analogiques et de l’approche littérale ; et enfin , le mélange du sod, du mystère, avec l’interprétation simple que l’on attribue au Gaon de Vilna. L’acrostiche de ces écoles d’interprétation de la Bible ‘’PARDES’’, a été utilisée depuis le moyen-âge. Ce terme ‘’pardes’’ est à rapprocher du grec paradeïsos qui signifie paradis ; d’autres le traduisent par verger - PARDES : Pé pour le pschat, le sens littéral ; Rech pour rémèz, sens allusif ; Daleth, pour drach, interprétation homélitique ; et Samekh pour sod, interprétation ésotérique ou mystique. Pour illustrer cet enseignement, je voudrais que l’on aborde cette parole de la Thora : ‘’Yossef avait été descendu vers Mitzrahim et Potiphar l’acheta de la main des Ismaélites… D… fut alors avec Yossef . Il fut un homme qui réussissait en tout et cela se passait dans la maison de son maître égyptien’’ (Gen. XXXIX). Ce qui interpelle à première lecture, c’est la répétition à trois reprises du verbe ‘’vayehi – il fut’’ . De plus, le fragment de phrase ‘’il fut admis dans la maison de son maître’’, semble à priori superflu. Le texte poursuit en réitérant ces mêmes termes, en y associant le maître de Yossef : ‘’Lorsque son maître s’aperçut que D… était avec lui et que tout ce qu’il faisait , D… le faisait réussir…. Il trouva grâce aux yeux de son maître….qui le plaça au-dessus de toute sa maison…Il arriva alors que depuis qu’il l’avait établi comme intendant dans sa maison et sur tout ce qu’il avait, D… bénit la maison de l’Egyptien à cause de Yossef…’’. La lecture attentive de ce texte nous permet de constater qu’il est fait mention en premier de la grande réussite de Yossef dans tout ce qu’il entreprenait. Mais dès lors que le maître lui confie la haute main sur tous ses biens, le terme d’appréciation qui revient est celui de la bénédiction et non plus celui de la réussite . Comme si le lecteur était invité à déceler que lorsque Yossef est chargé d’une mission couronnée de succès, marqué par la liberté d’action et de réalisation qui lui est accordée, il parvient même à attirer la bénédiction de l’Eternel sur son ouvrage. Nous retrouvons dans la tradition ces deux termes concomitants ‘’berakha véhatslaha’’ – la bénédiction et la réussite. Prise séparément, la hatslaha, la réussite, définit un état, une réalisation qui ne souffre pas de nuisance, où tout se déroule pour le mieux, selon les normes et le plan préétablis et l’attente escomptée. Cette réussite peut être qualifiée de ‘’toute naturelle’’. Par contre, la notion de ‘’berakha’’, bénédiction, s’applique à une réussite qui va au delà des normes établies et du but visé . Ce n’est pas une réussite ordinaire. Elle ne répond pas à la norme des choses. Le vœu exprimé ‘’berakha véhatslaha’’, vise à associer ces deux éléments. On pourrait mettre en parallèle à cet enseignement, le sens du nom divin ‘’Elohim’’ qui évoque l’attribut du D… de la rigueur, créateur des lois de la nature et fond son nom en elle pour l’imprégner de ses lois. D’où la valeur numérique du nom ‘’Elohim’’ égale à quatre-vingt six ; la même que celle de la nature ‘’hateva’a’’. Dans le même ordre d’idée, la hatslaha , la réussite, qui procède du nom divin Elohim, fait ressortir le succès naturel de l’entreprise de l’homme, qui obéit à l’ordre établi par l’Eternel et qui lui est confié pour le réaliser. Comme dit la Thora : ‘’L’œuvre que l’Eternel avait créée afin que l’homme en poursuive l’essor’’ (Gen. II, 3). Notons par ailleurs que le nom ‘’Elohim’’ s’apparente à tout ce qui a une existence matérielle physique et souligne la direction divine de tout ce qui venu à l’existence. Par contre, le tétragramme ineffable met en relief l’attribut divin de bonté. En d’autres mots, une dispense de bien qui émerge de la volonté divine et qui se répand sur le monde et sur l’œuvre de l’homme pour le combler de bonnes grâces. La nature de ce débordement est de l’ordre du surnaturel qui ne peut être atteint que lorsque l’on jouit de toutes ses facultés, de toute sa liberté. A présent nous pouvons relire le texte sous cet éclairage. Yossef , sous la coupe de son maître, ne pouvait atteindre que la réussite et non la bénédiction. En somme, n’étant pas affranchi de la servitude , il se trouve soumis aux lois de son maître et ne peut accéder à la bénédiction qui réclame le dépassement de l’état de servitude. Voilà ce qui explique le pourquoi le texte souligne qu’il fut dans la maison de son maître égyptien. Et néanmoins, D… l’aidait à réussir ce qu’il entreprenait. Mais lorsque le maître égyptien l’a libéré en le nommant intendant de tous ses biens, Yossef pouvait dès lors bénéficier de la bénédiction de D… qui se répandait par là même sur tout ce qu’il gérait. Nous pouvons dire par analogie que de nos jours le peuple juif connaît l’indépendance d’Israël. Certes, il a vécu des faits miraculeux dans son exil également. Mais il n’a jamais connu la grandeur des miracles extraordinaires auxquels il a assisté sur sa terre. Ainsi donc, le souhait que nous formulons habituellement ‘’berakha véhatslaha’’, renferme en premier le souhait d’être un homme libre, apte à connaître la bénédiction dans la réussite de l’œuvre entreprise.
Grand Rabbin Chalom Benizri.
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