Shabbat Hol Hamoed : Le retour
Hol Hamoed est une période de joie car il s'agit d'un temps de progression. Deux sortes de joie existent dans la tradition d'israël: Simha et Sasson. Simha exprime la joie ressentie à la réalisation d'un objectif, lorsqu'un but est atteint. Sasson représente la joie inhérente au processus de perfectionnement, portés par l'élan d'amélioration. C'est de cette deuxième forme de joie qu'il est question à Hol Hamoed (Pessah et Soukkot). Le shabbat Hol Hamoed - au milieu de cette dynamique positive - a donc un statut très particulier. La Superstar de ce shabbat: Ezeckiel. C'est sa vision prophétique qui est mise à l'honneur à Hol Hamoed (Pessah et Soukkot).
Ezeckiel Ben Bouzi Hacohen est probablement le prophète le plus mystérieux. Ses positions religieuse, sociale et géopolitique dépassent souvent notre portée. Au point que nos sages ont voulu retrancher du canon biblique les 48 chapitres du prophète. Finalement, ils attribueront a Hanina Ben Hizkiya la somme de $30,000 (300 barils d’huile) pour qu’il explicite 300 sujets délicats traités par Ezeckiel. Sa répartition finale (en 12 strates) de la terre d'Israël ne plairait pas à John Kerry. De même que le sujet qui nous occupe ce shabbat - la vision des ossements desséchés - choque la conscience religieuse. Le prophète y compare l'exil religieux des communautés dispersées à plusieurs cercueils – certes intactes (etsem shelema) - qui retrouveront leurs vitalités avec le retour d'Israël sur sa terre. Cette revivification s'inscrit dans un cadre plus large généralement appelé Tekhiyat HaMetim - la Résurrection des Morts.
La question traitée par le Guemara (Sanhédrin, 92b), par rapport à ce texte, s'impose ici aussi: cette prophétie exprime-t-elle une réalité tangible ou une parabole forte ? Pour rabbi Eliezer, aucun doute: il s'agit d'un événement historique (retour des exilés de Babylone). Rabbi Yehuda ben Batira, du même avis, témoignera "Je suis l'un de leurs descendants. Voici d'ailleurs les téfilines que mon grand-père m'a léguées". D'autres pensent qu'il s'agit d'une vision, d'un rêve et difficile il est de les contredire puisqu'un terme descriptif tel que "Et la main de D'ieu sera posée sur moi" (Haftara, verset 1) va à l'encontre totale d'une expérience réelle et vécue. Alors la Guemara (cfr. même passage) conclura "Mashal Haya - Beemet" signifiant il s'agit d'une parabole – mais bien réelle. Autrement dit, viendra un temps dans l'histoire où le peuple d'Israël retrouvera son indépendance après avoir vécue dispersé et - agonisant - en Gola.
Le signe de cette résurrection des morts - au niveau national ? L'abondance de courants de pensée. À l'époque du second temple, le peuple comptait Pharisiens, Saducéens, Zélotes, religieux, laïques, karaïtes. Mais durant 2000 ans d'exil, seul le judaïsme rabbinique a subsisté. Jusqu'au 19ème siècle, chaque juif se disait, d'ailleurs, d'ascendance rabbinique. Aujourd'hui, nous pouvons revendiquer une identité laïque, orthodoxe, nationale religieuse, conservatrice, traditionaliste ou encore reconstructioniste. Une parabole ? Peut-être, mais bien réelle dans ce cas.
Moadim LeSimha,
Lionel – correspondant judéen