Vayigash : Mens Sana in Corpore Sano (05/12/2013)


Deux conceptions s’affrontent tout au long de l’histoire : celles de Yehuda et Yossef.                      

Les temps messianiques dépendent de la rencontre entre le corps et l’esprit d’Israël.

Les haftarot, comme chacun sait, insistent en général sur l’essentiel de la parasha pour en illustrer le contenu. Le prophète Ezeckiel aurait logiquement du traiter de la descente du peuple en Egypte, ce thème étant central dans notre parasha. Mais la haftara toûche un autre sujet : la rencontre des 2 « arbres d’Israël » ou la collision entre Yehuda et Yossef.

La parasha commence très fort : « Et Yehuda s’avança vers lui… ». Vayigash est la seule section de la thora qui commence au milieu d’un dialogue interrompu à la fin de Mikets. Nos sages –responsables des coupures de la thora- y ont forcément vu un tournant énorme. Yehuda apparaît pour la première fois comme apte au leadership. Lorsqu’il s’agit de prendre des responsabilités –Vayigash- c’est lui qui remplit cette fonction dans la famille ; il agit d’en bas. Yossef, lui, représente une autre facette de la royauté d’Israël – qui agit d’en haut. On pourrait, précisément, associer la perfection à Yossef et le perfectionnement à Yehuda. Car Yossef est celui qui n’a jamais connu la faute tandis que Yehuda a cette faculté de se relever, il est l’inventeur de la Teshuva (après avoir succombé à Tamar) – moteur du futur d’Israël.

Le roi David (psaume 48, 5) voit dans ces 2 personnages 2 types de messianisme. Le premier – Mashiah ben Yossef- exprime une tradition messianique qui touche au cosmopolite. La Guéoula ne vient effectivement pas sans relations internationales, sans dirigeants qui ont appris l’art des sciences politiques chez les Nations. Le Mashiah Ben Yossef est celui qui côtoie les cafés parisiens et autres salons de Vienne du 19ème à l’instar de Yossef au Palais du Pharaon, conscient de la dimension politique du processus de Gueoula. C’est l’enveloppe. Mais le cœur se joue en Israël avec celui dit Mashiah Ben David – descendant de Yehuda. Nous avons la preuve dans notre parasha (ch 46, 28) lorsque Yaakov n’acceptera de rejoindre sa famille en Egypte que sous condition. Il ordonne à Yehuda de lui bâtir une maison d’études (Rashi) fidèle à l’enseignement de ses pères, fidèle à la Thora d’Eretz Israël. Une manière pour Yaakov de dire à Yossef que le destin ultime du peuple juif se joue en Israël. Yaakov vient ici de s’aligner avec la vision de Yehuda.

Pour nous, sportifs, la recette gagnante du messianisme repose donc sur un dicton familier : « Un esprit saint dans un corps saint ». A l’enterrement de Theodore Herzl, le Rav Kook compara le corps, l’enveloppe exécutive au Mashiah Ben Yossef et l’esprit au descendant de Yehuda –Mashiah Ben David. Or, si cette opposition saine entre ces 2 conceptions traverse l’histoire juive toute entière (Elisha ben Abouya – Rabbi Akiva, Rehavam – Yerovam, etc..), c’est parce que ces 2 rôles sont essentiels. Ils expriment en eux l’essence et l’aboutissement de tout le livre de Bereshit : relier matériel et spirituel, la splendeur et l’éternité.

Shabbat Shalom,

Lionel.