Vayishlah : 3 identités juives (14/11/2013)
Le passage de « Yaakov » à « Israël » traduit un passage du « religieux » au « national ».
Il existe une 3ème facette à l’identité juive. Quand la vivrons-nous ?
La Guemara (berakhot, 12b) associe la transformation du nom de « Yaakov » en « Israel » à la mutation identitaire vécue par le peuple juif en 1948. Dans une discussion sensationnelle entre Ben-Zoma (un élève de Rabbi Akiva) et les Sages, le talmud confirme que la fondation de l’état d’Israël est un évènement plus important que la sortie d’Egypte. En effet, le prophète Isaïe nous avait déjà assuré que viendrait un temps où l’on ne parlera plus de l’Eternel comme ayant fait sortir les enfants d’Israël d’Egypte mais comme celui qui a rassemblé les exilés de la maison d’Israël pour les ramener sur leur terre. Nos Sages sont encore plus précis et parlent expressément de l’indépendance politique d’Israël (mai 1948).
La question est donc : « Doit-on encore aujourd’hui, 65 ans après la création de l’état, mentionner la sortie d’Egypte (dans la prière du shema) ? ». La guemara dit OUI et s’appuie pour cela sur notre parasha. Car, même si Yaakov s’y voit attribuer le nom d’ « Israël », le texte continue de l’appeler Yaakov. C’est la preuve, pour les sages du talmud, que même si l’identité principale du peuple juif est aujourd’hui nationale (caractérisée par la fondation de l’état d’Israël), il ne faut pas, pour autant, oublier notre identité religieuse (forgée après la sortie d’Egypte). Cela veut aussi dire qu’il y’à 65 ans ne s’est pas seulement opérée une transformation géographique mais une mutation d’identité. Selon les conclusions du talmud, il y’a une époque où nous sommes « Yaakov », une autre ou nous vivons comme « Israël ».
Yaakov représente l’identité religieuse, individuelle. Israël représente l’identité nationale. L’appellation « juif » (« joden », « Jew », etc…) trouve d’ailleurs sa racine dans « Judaeus » qui, en latin, faisait référence au Royaume de Juda. Il était donc clair que nous faisions allusion, à l’époque, à une identité nationale ; on parlait des « Juifs » et des « Romains », des « Juifs » et des « Grecs » (comme on dirait aujourd’hui les « Juifs » et les « Norvégiens »). Mais alors que nous étions considérés comme une Nation juive pendant 1200 ans, le sanhédrin de Napoléon a transformé le Judaïsme en religion, en culte. Et nous somme « retombés » dans la dimension uniquement religieuse de Yaakov.
En 1948, nous avons vécu le passage de « Yaakov » à « Israël » mais pas sans difficultés. Certains continuent donc de penser que nous sommes uniquement une religion - c’est faux historiquement, tanachiquement et étymologiquement. D’autres pensent qu’Israël, en tant qu’état, doit abandonner les traditions et pratiques religieuses – absurde, c’est précisément ce qui nous a sauvés en Exil. L’épisode du nom donné à Yaakov nous encourage à mettre en valeur l’identité nationale d’Israël mais SANS OUBLIER la dimension spirituelle. Et pour vous dire toute la vérité, il existe une 3ème facette à cette identité (puisque notre ancêtre Yaakov porte 3 noms différents). Comment s’appelle-t-elle ? Quand se dévoilera-t-elle ? La réponse mercredi prochain.
Shabbat Shalom,
Lionel Benizri.