BÉRÉCHITE (Genèse)
CHÉMOT (Éxode)
VAYIKRA (Lévitique)
BAMIDBAR (Nombres)
DÉVARIM (Deutéronome)
BÉRÉCHITE (Genèse)
 

 

 

L’ère messianique 

‘’Rassemblez-vous tous ensemble ! Je voudrais vous dire ce qui vous arrivera à la suite des jours’’, telles furent les paroles du patriarche Yaakov à l’adresse de ses enfants. Il voulait leur révéler  la fin des temps, l’avènement messianique. Mais la présence divine, la Chékhina, s’est retirée de lui et il a prononcé d’autres paroles,’’ dit Rachi.

Un des treize principes de foi de Maïmonide qui alimente la conscience juive est :’’Je crois d’une foi parfaite en la venue du Messie et même s’il tarde, malgré cela, je l’attendrai chaque jour ‘’. Maïmonide dit par ailleurs : ‘’Tous les Juifs, y compris leurs prophètes et leurs Sages, ont toujours aspiré à l’ère messianique parce qu’ils voulaient être soulagés de l’oppression des nations qui ne les laissent pas observer comme il convient la Torah et ses commandements. Ils en attendent la tranquillité afin de pouvoir acquérir la sagesse et ainsi devenir dignes du monde à venir ‘’ ; ce qui corrobore l’enseignement talmudique : 

 ‘’L’ère messianique s’ouvrira lorsque les Juifs retrouveront leur indépendance, et la royauté d’Israël sera restaurée.’’

Nos Sages formulent cela en ces termes : ‘’Il n’y a entre ce monde ci et l’ère messianique d’autre différence que notre asservissement par les Nations. ‘’. Notre génération a le grand bonheur et l’immense privilège d’être le témoin vivant des signes précurseurs de l’avènement messianique, celui de la renaissance et du développement d’Israël , de son indépendance et du rassemblement des exilés parmi les Nations. C’est à cela même que se réfèrent  les écrits de nos Sages. Le Talmud (traité Sanhédrin 98) indique au nom de Rabbi Abba ''Une des meilleures sources révélées par le prophète Ezéchiel est exprimée en ce verset (chap.36 v.8) :’’Et vous, montagnes d’Israël, vous donnerez votre frondaison et vous porterez votre fruit pour mon peuple d’Israël, car ils sont prêts de revenir’’. 

En quoi ce signe est-il prépondérant et révélateur d’un éclat de la présence divine et de l’approche de la délivrance messianique ? 

Le yalkout Chemoni, nous en donne la réponse à travers ces mots du Prophète Isaïe (chap. 35 v. 1,2) : ‘’Que le désert et le sol brûlé se réjouissent ! Que la plaine aride exulte et fleurisse comme la rose ! Qu’ils se couvrent de fleurs, que leur joie délirante se traduise par des chants que la gloire du Liban leur soit prêtée, l’éclat du carmel et du charon ! Ils vont voir la gloire de l’Eternel, la splendeur de notre D…’’ Ce qui signifie qu’à l’heure où l’Eternel dévoile sa présence au peuple d’Israël, il ne se révèle pas d’un seul coup ; l’humanité ne pourra pas contenir son infinie bonté. L’Eternel procède pas à pas. Au début il réjouit les terres du pays, puis celles de Jérusalem … dans un ordre croissant : le désert, le sol brûlé, se réjouissent. Par la suite, la plaine aride exulte ; que la gloire du Liban leur soit prêtée , l’éclat du carmel et du charon et seulement après, ils verront la gloire de l’Eternel, la splendeur de notre D… .

Le rassemblement des exilés est décrit quant à lui , à travers ces paroles de la Torah ( Deutéronome XXX- 4) : ‘’Tes proscrits, fussent-ils à l’extrémité des cieux, l’Eternel ton D… te rappellerait de là, et là même, il irait te reprendre et il te ramènera,  l’Eternel ton D… dans le pays qu’auront possédé tes pères, et tu le possèderas à ton nom et il te rendra florissant et nombreux, plus que tes pères’’. 

La prière silencieuse, répétée à trois reprises journellement met également l’accent sur ces signes. Dans la bénédiction des années :  ‘’Dispense rosée et pluie de bénédictions sur toute la surface de la terre ; abreuve la surface du globe ; rassasie le monde entier de ta bonté.’’. Ensuite dans la supplique ’’Sonne du grand chofar pour notre libération ; élève l’étendard pour rassembler nos exils. Rassemble-nous ensemble des quatre coins de la terre vers notre pays.’’

Ce sont là les signes de l’avènement messianique que nous espérons voir poindre en tout instant.

Cependant, bien que nous attendions chaque jour la venue du Messie, nous ne devons pas fixer un temps à sa venue, comme dit Maïmonide :’’Nous ne devons pas fixer un temps à sa venue, ni tenter de spéculer sur sa venue à partir des passages des Ecritures’’. 

A cela un de nos Sages ajoute :’’Que celui qui sait quand viendra la 

délivrance, ne le dise pas et celui qui  le  dit… il ne le sait pas !’’

Enfin, qui peut se prévaloir d’être plus émérite que le patriarche Yaakov qui a voulu révéler la fin des temps et qui en a été empêché par la providence divine.

Ce qui nous est octroyé, c’est la conscience de notre aptitude de hâter la délivrance messianique de par notre volonté. Comme l’atteste le Talmud en s’inspirant des paroles prophétiques d’Isaïe (chap .60) ‘’Moi l’Eternel, l’heure venue, j’aurai vite accompli ces promesses.’’

L’apparente contradiction dans le texte  ’’ beïta,’’ l’heure venue’’ et Ahichena, ‘’j’aurai vite’’, fait dire à nos Sages : ‘’Si les enfants d’Israël ne sont pas méritants, alors la délivrance sonnera à l’heure venue’’. Dans le cas contraire,’’ahichena’’ je hâterai l’accomplissement de cette promesse.’’ Cela résulte donc de notre bon vouloir d’instaurer la justice et la paix, la bonté et l’amour du prochain et de nous porter à un niveau spirituel, dans le respect de la Torah  et la pratique des mitzvoth pour hâter la délivrance messianique.

 

Le croisement des mains

‘’La patriarche Yaakov étendit sa main droite, l’imposa sur la tête d’Ephraïm qui était le plus jeune et mit la main gauche sur la tête de Ménaché ; il croisa ses mains, car Ménaché était l’aîné’’ (Gen. XLVIII – 14). ‘’Il les bénit en ce jour et il dit : ‘’Par toi Israël bénira en ces termes, et D… te fera devenir comme Ephraïm et Ménaché !’’ et il plaça Ephraïm avant Ménaché’’ (Gen. XLVIII – 20).

A deux reprises, le patriarche Yaakov donna la préférence au cadet de ses petits-fils par rapport à l’aîné. Ce qui ne manque pas de susciter notre étonnement. D’autant plus que par le passé, c’est en donnant la primauté à Yossef sur ses frères, que la dissension a éclaté parmi les frères et qu’ils en arrivèrent même à la vente de Yossef, avec toutes les conséquences douloureuses que l’on connaît. Le regard attentif sur un détail dans l’ordre de priorité accordé à la main droite par rapport à la main gauche, nous permet de comprendre que le geste du patriarche Yaakov ne peut être qualifié d’intention de favoriser l’un par rapport à l’autre. En effet, tant dans l’ordre du port d’un vêtement ou de l’ablution des mains etc… que pour la bénédiction des prêtres, nos Sages recommandent de donner la prépondérance à la main droite. Celle-ci doit être plus élevée pour qu’elle l’emporte sur la main gauche. Yaakov ayant porté ses mains intelligemment sur la tête de ses petits-enfants, comme il ressort du mot ‘’shikel’’ dérivé de ‘’sekhel’’, intelligence, il aurait convenu, en croisant les mains, de porter la gauche en premier sur la tête de Ménaché et la droite sur Ephraïm, de sorte que la droite serait au-dessus de la gauche et aurait l’avantage sur elle. Mais Yaakov n’a pas obéi à cet ordre. Il déposa en premier sa main droite sur Ephraïm et ensuite la gauche sur Ménaché, de façon à ce que la main gauche soit au-dessus de la main droite. Remarquons que la main n’est pas seulement l’organe par excellence d’exécution du cerveau humain. Elle sert aussi d’organe de transmission de l’esprit saint, tel que cela apparaît à l’occasion de l’ordination : ‘’L’Eternel dit à Moïse : ‘’fais approcher Josué fils de Noun, homme animé de mon esprit et impose ta main sur lui’’ (Nb. XXVII – 18), de la consécration :’’Il appuiera sa main sur la tête de la victime’’(Lév. I – 4), ou encore de la bénédiction : ‘’Aaron étendit ses mains vers le peuple et le bénit…’’(Lév. IX – 22). Soulignons cependant que ce rapport entre l’esprit et les mains ne s’établit que lorsque la droite et la gauche s’associent dans l’acte accompli. C’est alors qu’il y a lieu de donner la primauté à l’influence de la droite sur la gauche. En l’occurrence, ici, l’objet de la bénédiction adressée à Ephraïm n’a aucun rapport avec celle adressée à Ménaché. Chacun selon ses aptitudes spirituelles, reçoit la bénédiction qui lui sera la plus bénéfique pour son épanouissement personnel et dans la voie qu’il s’est choisie pour servir son créateur. Il n’y a nulle compétition entre la droite et la gauche. La réussite de l’une n’est pas fondée sur l’échec de l’autre, ou inversement. Les deux aspirent au même but, mais chacune emprunte la voie qui lui sied le mieux. On pourrait dire que la bénédiction pour Ephraïm porte sur la qualité, alors que celle de Ménaché porte sur la quantité. C’est par souci de ne pas humilier le premier-né, Ménaché, que Yaakov préféra croiser les mains sur leurs têtes, au lieu de les faire changer de place, comme le lui suggéra Yossef. Et en effet, l’histoire témoigne que Josué, descendant d’Ephraïm, mènera le peuple à la conquête d’Israël. Il le partagera entre les différentes tribus et lui enseignera la Thora. Son nom sera connu dans le monde lorsqu’il donnera cet ordre : ‘’Soleil arrête-toi sur Gabaon ! Lune, fais halte dans la vallée d’Ayalon’’ (Josué X – 12). Ménaché par contre, l’emportera par la quantité. Ainsi, à la sortie d’Egypte, la Thora dénombre quarante mille âmes dans la tribu d’Ephraïm, et trente-deux mille seulement pour la tribu de Ménaché. Mais à l’approche de l’entrée du pays d’Israël, le dénombrement indique pour Ménaché cinquante-deux mille, et pour Ephraïm trente-deux mille. Il est évident qu’il ne s’agit pas d’une bénédiction physique uniquement, mais également spirituelle et morale. Par ailleurs, en portant la main droite sur la tête d’Ephraïm, Yaakov a voulu signifier que celui-ci bénéficiera d’une conduite qui relève du surnaturel, du miracle. Alors que la main gauche, celle posée sur Ménaché, désigne la direction, dans l’ordre naturel des choses. Notons que la bénédiction destinée à Ephraïm est appelée à se réaliser rapidement dans le temps, alors que pour Ménaché, c’est au fil du temps qu’elle s’accomplira . C’est pourquoi il leur attribua la même bénédiction, en disant que : ‘’D… devant Qui ont marché mes pères Avraham et Itzhaq, que l’Eternel qui a veillé sur moi depuis ma naissance jusqu’à ce jour, que l’ange qui me délivra, bénisse les enfants ! Que mon nom soit nommé en eux et le nom de mes pères Avraham et Itzhaq ! Qu’ils se multiplient à l’infini au sein du pays !’’ (Gen. XLVIII – 15, 16).

 

Israël et les nations 

Dans le traité Chabbat,  Rav Kahana rapporte cette omélie, cette dracha de Rabbi Nathan Bar Manyoumi au nom de Rabbi Tanhoum : ‘’La lumière de la Hanouquiya placée à une hauteur de plus de vingt coudées du sol (environ dix mètres) n’est pas valide, parce qu’elle n’est pas à portée de vue à cette hauteur, et les passants n’y verront pas la publication du miracle.

Le même principe s’applique également à la Soucca dont le toit de feuillage situé à hauteur de plus de vingt coudées, lui fait perdre son effet.  

Par la même occasion le Talmud rapporte cet autre enseignement  de Rav Kahana inspiré de Rabbi Nathan Bar Manyoumi au nom de Rabbi Tanhoum : ‘’Que signifie cette parole de la Thora au sujet de la fosse dans laquelle fut jeté Yossef par ses frères :’’ la fosse est vide, elle ne contenait pas d’eau’’ dit le texte (Gen. XXXVII – 24). Si la fosse est vide, ne savons-nous pas qu’elle ne contient pas d’eau ? Qu’est-ce que cela peut signifier ? Cette expression nous enseigne que l’eau ne s’y trouve pas, mais bien les serpents et les scorpions. 

A priori la juxtaposition de ces deux enseignements ne présentent pas de rapport entre eux. C’est probablement les seuls qu’avait retenus Rabbi Nathan Bar Manyoumi au nom de Rabbi Tanhoum. Aussi le Talmud les présente l’un après l’autre, comme il est habituel. Il nous est loisible néanmoins d’y établir une relation qui  justifierait le pourquoi ils vont de pair.

Voyons avant tout le commentaire de nos Sages du Midrach à propos de cette expression :’’la fosse est vide et ne contient pas d’eau’’. 

Rabbi Aha dit : ‘’la fosse de Yaakov s’était vidée de son contenu’’, ‘’véhabor rek’’, elle ne contient plus les paroles de la Thora comparée à l’eau. En d’autres termes, cette eau vivifiante qui alimente le cœur et l’esprit du peuple juif, s’est quelque peu asséchée, et de ce fait ce sont les serpents et les scorpions qui occupent la place vacante. 

De même que l’eau est un élément vital pour l’homme, elle l’est également pour la terre qu’elle fertilise. De même qu’elle véhicule la vie, elle permet la régénérescence dans un mikvé, et véhicule le savoir, la Thora. Privé de cet élément vivifiant, l’homme s’expose à des espèces venimeuses qui inoculent le poison.

Je voudrais rappeler à cet égard cet autre enseignement du Talmud  (Ketouboth 66 b).  Nos Sages relatent cet épisode que connut Rabbi Yohanan Ben Zakaï qui vivait à Jérusalem à l’époque de la destruction du second Temple. Sortant à dos d’âne de Yerushalaïm suivi de ses disciples, il aperçut une jeune fille occupée à glaner des grains d’orge parmi le crottin des bêtes. Celle-ci cacha son visage avec sa chevelure et s’approchant de lui, l’interpella en lui disant : ‘’Rabbi, procure-moi ma subsistance’’. Rabbi Yohanan Ben Zakaï ne la reconnaissant pas, lui dit : ‘’Qui sont tes parents?’’ . Elle répondit :’’Je suis la fille de Nakdémon Ben Gourion’’. ‘’Mais, où est donc passée toute la richesse de ton père, ma fille ?’’, s’étonnant , tant il était surpris de la misère à laquelle elle était réduite.

Rappelons que Nakdémon Ben Gourion était un des plus grands richards de Jérusalem en cette génération, et qu’il contribuait grandement à l’aide sociale. D’aucuns disent que l’œuvre de bienfaisance qu’il pratiquait était motivée en vérité, pour sa gloire. Pour d’autres, il ne faisait pas suffisamment, en rapport avec sa richesse.

Rabbi Yohanan Ben Zakaï éclata en sanglots et s’exclama: ‘’ Bienheureux est le peuple d’Israël. Lorsqu’il accomplit la volonté de l’Eternel, aucune nation et aucun peuple ne peut prendre le dessus sur lui . Et lorsqu’il ne se conforme pas à cela, il est livré entre les mains d’une nation méprisable. Et non seulement cela, mais à la merci de leurs animaux.’’

Cet hommage fait au peuple d’Israël, tant lorsqu’il est porté aux nues que lorsqu’il tombe si bas, ne manque pas de nous étonner. Certes, ce que Raban Yohanan Ben Zakaï veut mettre en exergue, c’est que le peuple d’Israël bénéficie d’une providence divine individuelle toute particulière, et n’est pas jugé comme les autres nations.

‘’En mazal lé Israël’’ , dit-on, ‘’Israël n’est pas soumis aux signes du zodiaque.’’ Le déterminisme du destin inscrit dans les étoiles, n’est pas sans appel pour lui. Il existe d’autres moyens d’action capables d’influer sur le cours des destinées humaines, tels que la téchouva , le retour vers D… - la téfila, la prière – la tsedaka, la charité, chinouï ha chem, le changement de nom – chinouï ha makom, le changement de lieu. Le Juif a conscience qu’il possède la capacité de sortir hors de son destin astrologique.

Raban Yohanan Ben Zakaï indique par cet hommage Achrékhem  Israël, qu’à la différence des destinées des autres nations commandées par les contingences naturelles, physiques, sociales et économiques, l’histoire d’Israël est celle de l’esprit.  

Comme dit le Rabbin Elie Munk dans son commentaire de la Thora en des termes éloquents : ‘’La grandeur et la décadence d’Israël suivent la courbe ascendante ou fléchissante de sa force morale et spirituelle.  Contrairement aux autres nations, Israël peut atteindre un degré de sanctification où l’esprit dominant la matière est assez fort à lui seul pour animer de son souffle l’ensemble de la nation, et lui assurer la vie éternelle.’’

Rabbi Yohanan Ben Zakaï qui vivait en cette époque de la destruction du second Temple, professait que le peuple d’Israël pouvait poursuivre son existence durant des millénaires, sans pays, sans gouvernement et sans langue commune ; uniquement par la force de l’esprit.

On pourrait traduire  cela en empruntant l’image de l’ordre naturel des éléments créés qui nous entourent. Ceux-ci possèdent des caractéristiques inhérentes à leur nature première, à leur essence. A celle-ci peuvent venir se greffer d’autres propriétés et d’autres fonctions qui leur confèrent une ou des valeurs ajoutées.

Ainsi le bois provenant de l’arbre se distingue par les particularités qui le déterminent. L’arbre une fois découpé et raboté, peut servir à la confection de mobilier. Il acquiert alors des valeurs nouvelles, celles d’ordre utilitaire et celles de l’aspect artistique, qui se superposent l’une à l’autre. Si ces dernières venaient à disparaître, le bois conserverait néanmoins son état initial et pourrait servir de combustible ou autre. Ainsi donc ces valeurs ajoutées n’altèrent pas la nature première du bois. Il en va de même lorsque l’élément additionnel donne naissance à un corps nouveau chargé de nouvelles propriétés qui s’amalgament en lui.

Ainsi un alliage de fer avec un autre métal tel que le cuivre, donne le bronze. L’association de ces deux corps fondus en un, est telle qu’ils réunissent en cette nouvelle combinaison des valeurs additionnelles. Il n’en est pas de même pour toute solution ou action chimique, ou encore dans le domaine de la génétique.

La combinaison moléculaire produit une métamorphose complète sans possibilité de dissociation.

Nous connaissons par ailleurs l’existence des quatre niveaux d’éléments dans la nature créée. Celui du minéral, du végétal, de l’animal et de l’humain doté de parole, du verbe expression de la pensée. Nous savons également que l’ordre minéral est l’élément dominant, et que les trois ordres de valeur végétale, animale et l’être vivant doué de raison et du verbe, sont indépendants l’un de l’autre. Ils ne s’échelonnent point et ne se superposent pas l’un sur l’autre. 

Ainsi si on ôte la vie au règne animal, on le prive par là même, de la nature végétative qu’il renferme.  Il devient un objet inerte, un minéral. Car la force vitale et la force végétative contenues en lui, ont fusionné, se sont fondus,  pour former une entité nouvelle présentant d’autres caractéristiques. 

Il en va de même pour l’homme. Son attribut de personne dotée de la parole, animé de vie et de caractère végétatif, se voit chargé d’une identité particulière. Les facultés déposées en lui et l’âme qui lui a été insufflée, le font accéder à un niveau supérieur. 

Nous pouvons conclure par déduction, que pour l’être juif, la vertu qui le qualifie en tant que fils d’Israël, n’est pas une valeur ajoutée, mais un titre qui l’imprègne totalement. 

Yaakov, le patriarche, est appelé Israël. Il n’est pas porteur du titre d’Israël, il intègre cet attribut qu’il ne peut perdre, plus jamais. Ceci explique les deux métaphores employées par D… lorsqu’il annonce au patriarche Avraham que sa postérité sera comme les étoiles du ciel d’une part, et le sable de la mer d’autre part. Ces deux images représentent des extrêmes opposés. Alors que les étoiles brillent au firmament dans l’immensité de l’espace, le sable de la mer est foulé au pied par tout un chacun. C’est là la caractéristique du peuple d’Israël. Son ascension peut être vertigineuse, comme sa chute sera profonde. C’est là l’hommage de Rabbi Yohanan Ben Zakaï ‘’achrékhem Israël’’.

C’est là également le sens symbolique de la fosse vide ‘’bor rek’’, que le Midrach traduit en disant :la fosse de Yaakov le patriarche d’Israël s’est vidée de son essence parce que ‘’en bo mayim’’, elle ne renferme pas l’eau, symbole de la Thora. Et dès lors, il se trouve en présence de serpents et de scorpions. 

Dès lors, nous pouvons comprendre la relation qui existe entre les deux enseignements talmudiques, au nom de Rabbi Tanhoum. En effet, leur juxtaposition vient en réponse à la question de savoir si l’homme et la sagesse qu’il acquiert, se fondent en une seule personne, ou si ces deux vertus sont à dissocier l’une de l’autre.

Maïmonide donne la réponse à cette interrogation en disant : ‘’De même qu’un homme Sage est reconnu par sa sagesse et ses traits de caractère qui le distinguent du reste du peuple, ainsi doit-il être reconnu par ses actes, sa façon de manger, de boire, de parler, de marcher, de s’habiller etc…

La sagesse doit être un acquis de l’âme, non pas une valeur ajoutée qui envelopperait la personne comme un manteau que l’on peut ôter, un enrichissement culturel, mais comme une vertu qui forge tout son être. C’est de cela que se pare l’homme juif modelé par la Thora, à l’opposé du mode de vie prôné par la culture grecque.

L’élément fondamental qui fait l’objet d’une lutte âpre entre le monde juif et le monde grec, s’exprime dans cette dissension. Alors que le monde grec fait une distinction nette entre la sagesse et l’action de l’homme, la sagesse juive fait corps avec le mode de vie qu’elle préconise. Les 613 commandements de la Thora gouvernent notre marche dans la vie et notre conduite au quotidien. Le contenu de la Thora est destiné à éclairer notre marche dans la vie terrestre afin que nos actions soient le support de cette sainteté, de cette clarté. La lumière est le symbole de l’éclat de la sagesse et le miracle de la petite fiole d’huile ,de cette lumière qui chasse les ténèbres, représente la victoire de la sagesse d’Israël qui l’emporte sur celle des Grecs. C’est pourquoi cette lumière doit se situer à une proximité telle que l’œil puisse voir à sa lueur, et qu’elle soit intégrée à sa vue tout en étant sainte.

Au-delà de sa portée, située au-dessus de ses limites, la clarté projetée par cette lumière se trouve dissociée  de la vue et ne sert plus que de point lumineux ornemental, à l’instar de la  sagesse grecque détachée du monde de l’action. La fosse de Yaakov Israël privée d’eau vivifiante, devenue vide, est occupée par les serpents et les scorpions qui se cachent de la lumière.

 

 

Grand Rabbin Chalom Benizri.